Pour une jeune génération issue d’une époque marquée par des crises économiques, politiques et sociales sans précédent, les mots d’Alfred de Musset dans sa Confession d’un enfant du siècle publiée en 1836, paraissent étrangement familiers.
Derrière nous se trouve un passé révolu, devant nous se dresse l’aube d’un immense horizon, et entre les deux gît une mer houleuse et pleine de naufrages.
La jeunesse d’aujourd’hui, - « Millennials », « iGen » -, avec sa propre vision de la politique et une nouvelle approche de la vie en démocratie, chamboule le paysage politique traditionnel.
Cette génération demeure un mystère pour beaucoup. Que veut-elle ? Comment la pousser à participer au débat public ? Comment lui parler ?
Elle constitue pourtant une force politique majeure. La force politique des décennies à venir et un espoir immense pour nos démocraties occidentales.
Le premier tour de la présidentielle a une nouvelle fois mis sur le devant de la scène le débat sur la participation politique des jeunes. Cette année 33% des 25-34 ans se seraient abstenus. 82% des électeurs de 18 à 35 ans n’avaient pas voté aux élections régionales de l’année dernière. Un an plus tôt, 72% des jeunes électeurs âgés de 18 à 34 ans ne s’étaient pas déplacés pour voter au second tour des élections municipales. C’est un record dans l’Histoire de la Vème République.
Voir en ces chiffres un désintérêt des jeunes pour la politique serait cependant une erreur. La vie publique et le politique ne laissent pas les jeunes indifférents. Ils ont des valeurs et opinions qu’ils sont prêts à défendre. Beaucoup sont à la recherche d’un engagement local, visible et régulier qui leur donne le pouvoir d’agir.
Les attentes des citoyens, et notamment des jeunes, envers la politique changent. Ce défi de la participation à la vie de la cité doit être relevé. Notre démocratie ne peut être renforcée sans le soutien proactif de la jeunesse.
Un vote capable de bouleverser les élections
16 millions de personnes âgées de 17 à 35 ans pourraient devenir un moteur de notre démocratie. Les jeunes constituent une force majeure pour nos systèmes économiques, sociaux et politiques. Leurs codes et leurs valeurs poussent déjà des entreprises et des institutions publiques à remettre en question leur fonctionnement.
Notre façon de travailler, notre système de santé ou encore notre système d’éducation sont seulement quelques-uns des domaines qui connaissent une transition accélérée par l’épidémie de Covid19 et nourrie par les codes de la jeune génération.
Le vote jeune a le potentiel de bousculer les élections. Selon l’INSEE, en 2021, plus de 11 millions de personnes âgées entre 18 et 35 ans sont inscrites sur les listes électorales. C’est plus que n’importe quel autre groupe d’âge.
Une génération en quête d’une autre façon de faire de la politique
Le taux de participation des jeunes aux élections reste tout de même plus faible. D’abord, du fait d’une défiance envers le système électoral et sa capacité à produire du changement. Ensuite, parce que voter une fois tous les cinq ans ou tous les deux ans ne correspond pas aux attentes d’une jeunesse, qui veut s’impliquer dans la vie quotidienne et avoir le pouvoir de provoquer du changement.
En mars 2019, 160 000 jeunes étaient rassemblés dans la rue pour défendre la cause du climat. La campagne de mobilisation, organisée par Youth for Climate France est un exemple de mobilisation de la jeunesse autour d’une problématique importante pour notre société.
En 2021, 47% des jeunes âgés de 18 à 30 ans ont signé une pétition ou se sont mobilisés en ligne pour une cause dans les 12 mois précédant l’enquête. Publiée par l’INJEP (Institut national de la jeunesse et de l’éducation populaire, cette étude met en lumière une autre façon d’engager les jeunes.
En 2016, 3 340 000 de personnes de moins de 35 ans se sont portées volontaires au sein d’une association.
Les jeunes veulent s’engager sur des projets qui leur permettent d’agir et de contribuer à la réalisation d’objectifs communs.
Mobiliser une jeunesse engagée
Ils ne veulent pas simplement être les récepteurs d’un message politique ou d’une idéologie, mais être acteurs d’un projet politique qui leur donne de l’importance, un espace pour réfléchir et agir, bien au-delà du cadre des élections. Comment puis-je savoir cela ? Je suis moi-même une de ces jeunes.
Mobiliser les jeunes et les faire participer à la vie publique requiert un effort constant de construction d’une énergie locale qui donne à chacun l’occasion d’agir, d’avoir des petites victoires et de participer à sa façon.
Mobiliser les jeunes et les faire participer à la vie publique requiert aussi de la part des responsables politiques l’utilisation du digital comme outil pour construire des communautés fortes et durables.
La participation des jeunes à la politique est un des grands défis de notre temps. Des institutions démocratiques plus fortes, un système politique fondé sur la confiance et la cohésion de notre pays, voilà quelques-uns des enjeux liés à ce défi.
Les épreuves politiques, sociales et économiques qui se présentent à nous demandent que nous restions unis et forts. Cette génération a beaucoup à offrir sur le chemin qui se dessine devant nous.
Pour reprendre les mots d’Alfred de Musset, ce qui était n’existe plus et ce qui sera n’est pas encore totalement apparu. Ne faisons pas de cette période de transition la cause de notre mal-être mais l’occasion de faire ce qui doit être fait.
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